Le gouvernement offre 23 millions aux chasseurs Charles Jaigu
[16 août 2005]
Après le «cadeau d'anniversaire» de 9 millions d'euros fait en juillet au
Conservatoire du littoral et annoncé en fanfare par Jacques Chirac, à
l'occasion des trente ans de l'organisme, le gouvernement s'apprête à offrir une belle rallonge à un autre établissement public, l'Office national de la chasse. L'ONC devrait recevoir
une dotation annuelle de 23 millions d'euros.
Cette somme, versée sans roulements de tambours, renfloue une institution aux abois depuis quelques années. Sous la tutelle de l'État, elle était néanmoins financée par les chasseurs. Les voici rassurés: la cotisation qu'ils payent chaque année n'augmentera donc pas d'ici à 2007...
Cette opération, qui régularise des dépenses engagées à la demande de l'État – tel la fonctionnarisation de 1 600 gardes-chasses – s'inscrit dans le
droit fil des nombreuses améliorations de la vie des chasseurs, consenties
par la majorité depuis 2002: suppression du jour sans chasse imposé par
Dominique Voynet en 2000, fin des contrôles a priori des fédérations,
guichet unique pour la validation du permis. Quant à la querelle sur les
dates d'ouverture et de fermeture du gibier d'eau, elle est médiatisée par
le mécontentement des chasseurs de Camargue, des Landes, et de Picardie, alors que «dans les trois quarts des départements, les chasseurs sont satisfaits des dates d'ouverture», convient un membre de la Fédération nationale de la chasse.
Alors, pourquoi cette discrétion de la part du gouvernement? «La majorité a du mal à transformer en stratégie décomplexée sa politique d'apaisement vis-à-vis du monde de la chasse», note Thierry Coste, conseiller politique de la Fédération. Pourtant, le 1,4 million de chasseurs représente une cible électorale non négligeable à dix-huit mois de la présidentielle 2007, alors que CPNT, après plus de quinze ans de battues électorales, semble être, malgré les dénégations de son leader, Jean-Saint-Josse, au bout du rouleau.
«La droite a plus à gagner en renouant avec les chasseurs des campagnes
qu'en cherchant à séduire les écolos des villes», avance un élu UMP qui
regrette que le gouvernement n'assume pas ses choix de peur de «se fâcher avec les écolos». Un diagnostic sur lequel Nicolas Sarkozy s'est déjà penché: on est convaincu à l'UMP, tout autant que chez Philippe de Villiers, qu'il ne faut plus laisser filer cet électorat rural protestataire qui s'est détourné de la droite au cours des années fastes de CPNT.
Quant au ministre de l'Ecologie, Nelly Olin, déjà malmenée par Noël Mamère et Nicolas Hulot, elle ne veut pas se laisser réduire à ces débats
cynégétiques. Elle rappelle simplement que les 23 millions d'euros accordés à l'ONC sont dans les tuyaux depuis plusieurs mois. Et qu'il s'agit de l'aboutissement d'une négociation menée par Jean-François Copé, ministre du Budget. Tenant à souligner qu'elle n'est pas «ministre de la Chasse», elle cherche, dit-elle, le bon équilibre entre écologie et chasse. Et rappelle qu'elle a déjà publié un décret sur les «déchets ménagers», ou «les raffineries de pétrole». Dimanche, elle s'est envolée pour le Groenland, où se réunissent jusqu'à mercredi une vingtaine de ses collègues pour préparer, à la fin novembre, un sommet sur le changement climatique. Elle aimerait que ce soit l'occasion pour elle de parler d'autres choses que du gibier d'eau.
http://www.lefigaro.fr/france/20050816.FIG0178.html?080703
Pour réagir auprès du premier ministre : http://www.premier-ministre.gouv.fr/acteurs/premier_ministre/ecrire