Zoo d'Anvers : des éléphants s'en vont, d'autres arrivent...
Daisy & Dina s'en vont en France
C'est ce mardi 18 avril que les deux dernières éléphantes du Zoo d'Anvers rejoindront leur nouvel enclos du Zoo de Maubeuge, construit sur d'anciens remparts édifiés par Vauban.
Rappelons que la précédente occupante des lieux, Birma la solitaire, est partie se faire engrosser par les éléphants mâles du Zoo de Chester. Il semble qu'elle y ait déjà rencontré une âme soeur...
Soulevées à l'aide d'une grue, embarquées dans un container, Daisy et Dina, les deux amies inséparables, devraient trouver en France un enclos aménagé (enfin) de manière correcte pour les recevoir.
Agées toutes deux d'une trentaine d'années et désormais stériles, elles y finiront sans doute leurs mornes jours, sans enfants, sans famille, mais ensemble, ce qui n'est déjà pas si mal.
On sait que les choses ne s'étaient pas trop bien passées avec Bombay, la femelle dominante du petit groupe d'éléphants à Anvers, décédée faute de soins adéquats d'une infection du pied au Zoo d'Amiens.
Daisy et Dina auront-elles plus de chances à Maubeuge ? Qui peut le dire ?
On l'espère en tous cas.
On regrettera tout de même que le Zoo d'Anvers ne se soit pas saisi de cette occasion historique pour devenir le premier «zoo belge sans éléphants» dont rêvent tant d'activistes, convaincus de ce que les modes actuels de détention ne correspondent en rien aux besoins physiologiques, psychiques et sociaux de ces sympathiques pachydermes.
Il n'en sera rien.
En termes commercial, un zoo sans éléphant, c'est comme une soupe sans sel.
Les familles humaines paient pour y voir leur lion, leur girafe, leur rhinocéros, leur grand singe et leur éléphant, incontournables «Big Five» de toute visite au zoo digne de ce nom.
Après le départ de ses derniers dauphins, le Zoo d'Anvers avait déjà frisé la banqueroute.
Pas question de renoncer à Dumbo, surtout s'il fait des bébés, gage certain d'un accroissement des entrées.
Officiellement, bien sûr, la Société Royale du Zoo d'Anvers affiche évidement sa volonté de développer un programme de reproduction, en construisant un «espace familial» approprié pour accueillir des éléphants mâles et femelles.
Trois nouveaux spécimens sont donc attendus à court terme dans la métropole anversoise, dont le rôle sera de produire des éléphanteaux et de conserver le génome si précieux des espèces connues sous le nom d'Elephas Maximus, Loxodonta africana et Loxodonta cyclotis.
Certes, le Zoo d'Anvers a beau jeu de déclarer que les éléphants sont désormais une espèce gravement menacée, ce qui parfaitement exact.
Mais celle-ci serait déjà moins menacée si l'on renonçait d'abord à acheter à bas prix des éléphanteaux survivants de chasses massives comme au Parc Kruger, ou d'attentats terroristes comme à Ceylan, où les mines antipersonnelles posées par les «Tigres tamouls» dans les forêts font de graves dégâts mais aussi beaucoup d'orphelins éléphants très rentables à la vente.
Elle le serait encore moins si les cirques ne se débarrassaient pas de leurs éléphants-esclaves épuisés, dévorés d'arthrite au terme d'une sinistre carrière à faire les guignols sous un chapiteau.
Elle ne le serait pas du tout si une volonté réelle animait les gouvernements internationaux d'abolir totalement le commerce de l'ivoire et de réserver (avec le dixième du budget militaire le plus étriqué ou le millième du budget quotidien de M. Bill Gates) aux derniers géants du tertiaire des espaces de liberté ou de semi-liberté «in situ», dans leur région d'origine.
C'est là, et là seulement, que les éléphants pourraient se reproduire de manière normale, dans le contexte environnemental et culturel qui est le leur, et ceci pour le plus grand bénéfice de l'écotourisme et des populations locales.
Le Zoo d'Anvers est tout petit, coincé entre une gare de chemins de fer et une grande ville très animée, très polluée aussi.
On se demande vraiment comment, dans ce mouchoir de poche dont chaque millimètre est déjà exploité, les gestionnaires de la SRZA (2.867.858.70 euros de bénéfice en 2005, youpie ! ) vont pouvoir dégager l'espace nécessaire à l'accueil de trois éléphants et de leurs éventuels rejetons.
Nous apprenons avec plaisir qu'un tapis de mousse a déjà été installé dans le temple égyptien qui sert d'étable à éléphants, réduisant ainsi les risques d'arthrite ou d'infections des pieds.
Ne serait-il pas mieux venu de déplacer ces futurs reproducteurs vers le seul parc de Planckendael, où ils disposeraient à tout le moins d'un peu plus d'espace, de bains de boue et de gazon ?
Et qu'en est-il de leurs activités ?
Qu'a-t-on prévu pour ces malheureux ne souffrent pas d'un ennui pesant comme tous leurs homologues coincés dans un petit enclos ? Des jeux, des menus travaux d'entretien, des promenades, des séances de dessins ou de peinture ont-ils été envisagés ?
A quoi va-t-on les occuper ?
Il est assez paradoxal de constater que les delphinariums prétendent au statut de zoos tout en imposant à leurs dauphins des numéros de cirque, au prétexte que ces mammifères marins sont trop intelligents pour ne rien faire.
Sans shows, ils mourraient d'ennui, paraît-il. (Il serait plus juste de dire qu'ils sont expressément soumis au pire ennui pour les forcer à faire des shows, mais bon.. )
Et les éléphants ? Les tigres ? Les chimpanzés ? Sont-ils stupides au point de pouvoir ne rien faire tout au long de la journée, comme des poissons rouges en bocal ?
Si les éléphants doivent vraiment être gardés sous cloche et protégés de l'expansion humaine par les pays occidentaux, que ce soit alors dans des refuges dignes de les recevoir, tel ce vaste sanctuaire du Tennessee.
Ce n'est en effet qu'en de tels lieux que ces mammifères dotés d'une extrême intelligence peuvent vivre une vraie vie d'éléphants, non pas comme des images d'Épinal figées derrière le mur d'un enclos, non pas comme des réservoirs de génomes intéressants qu'il convient de préserver dans une sorte d'herbier des espèces disparues, mais bien comme des PERSONNES, des êtres conscients, intelligents, doux, drôles et bons, qui ont parfaitement le droit d'élever leurs enfants dans le respect de leurs propres traditions et de leurs cultures multimillénaires.
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