J'ai trouvé sur le forum de fast food nation un témoignage très interessant d'un ancien ouvrier qui travaillait dans un abatoir:
http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=111193.html
Hi all, :
Je sors de ce film choqué tant il est d'une réalité à tout craint.
Personnellement, il ya 14 ans en attendant de partir au service militaire, j'ai travaillé comme cela pendant 6 mois dans un abbatoir pour avoir un peu d'argent de coté pendant l'armée.
Ces 6 mois ont été pour mois un véritable cauchemar humain, je venais de terminer mes études et j'ai été confronté d'une manière aussi rapide, qu'intense que dramatique à la misère sociale, humaine et animale. Passer d'un mode de vie étudiant à la dure vie d'un smicard sans amélioration possible du lendemain développe l'esprit d'analyse mieux que n'importe quelle théorie.
J'ai travaillé à la chaîne dans une unité où justement l'on tuait les animaux. Je peux vous jurer que tout ce que j'ai vu ce soir dans ce film est l'exact reflet de ce que j'ai vécu ici en France.
Le sang jusqu'au cheville, les odeurs, les visites inopinés de la direction et des services vétérinaires, des clients qui veulent controler la qualité de la viande, les contres-maîtres qui méprisent les autres, les rivalités entre les salariés, la bze pour décompresser, les énormes machines, les accidents hebdomadaires : à l'époque il y avait un jeune gars comme moi qui travaillait à mes cotés et qui manipulait un sécateur pneumatique de découpe à air comprimé. L'espace d'un instant il fut inattentif à sa machine et dans un faux mouvement il s'est tranché net la main gauche que j'ai vu tombé dans une marre de sang. J'ai juste eu le temps d'appuyer sur le bouton d'arrêt d'urgence de la chaîne, de voir mon collègue hurler de douleur et tomber dans les vappes, d'aider les équipes à le mettre sur une civière. Je me rappelle ces terribles détails car j'ai ramassé sa main pour la mettre sur de la glace. Je n'ai jamais pu oublié ces instants.
Vu que j'étais dans un abbatoir je peux vous dire que l'odeur est à vomir. Quand je rentrais chez ma mère après le travail (que ce soit la nuit ou la journée) je dégageais une odeur pestilentielle meme apres la douche.
Je me rappelle un soir j'étais épuisé, (tant cest dur de travailler debout dans ces conditions, tant on se sent sale) avoir vu à l'époque le fim de D.Lynch "Elephant Man" et la fameuse répblique du personnage principal dire "je ne suis pas un monstre ; je suis juste humain".
Enfin quant aux souffrances animales, là aussi je peux vous dire, que les animaux "savaient" ou "comprennaient" que nous allions les abbatre. Oui un animal souffre avant dy laisser sa vie, oui la plupart des animaux ne meurent pas sur l'instant mais agonise dans les 2 à 5 minutes qui suivent la décharge électrique, le temps d'être vidé de leur sang ou bien même d'être ébouillanté sur la chaîne, quant on ne commence pas à les éventrer avant même qu'ils ne soient morts.
Peut-être que cela à changé depuis, je vous parle d'une expérience qui date des années 90-91. Mais je ny crois pas beaucoup.
Donc pour répondre aux deux questions d'origine : Oui il y a des scènes chocs dans ce film mais rien de pire que la réalité. Il faut arrêter de penser que l'on vit à Disneyland.
C'est tellement facile de penser que la violence n'existe pas ou qu'elle est plus acceptable parce qu'elle n'est pas sur le devant médiatique.
Non ce film n'est pas une fiction dans le sens qu'il montre parfaitement les imbrications, les tenants et les aboutissants des actions des protagonistes et les interactions entre les différents personnages. Il est dans la même veine que Traffic, Requiem for a dream, le cauchemar de Darwin, bowling for colombine, ou super size me ou le film français Ressources humaines de Laurent Cantet.
Pour tout ceux que les sujets de sociologie du comportement, sociologie du travail, de réflexion sur une société en déliquessance intéressent, je vous conseille fortement les écrits de P.Bourdieux, Loic Wacquant (en particulier ces écrits sur un sociologue aux USA), Christophe Desjours (dont le fameux Souffrance en France), Serge Halimi ou encore l'éminent intelectuel américain Noam Chomsky.
Même si le sujet n'est pas nouveau, et que d'aucuns décrivent toujours la même rengaine de dénonciation qui ne débouchent sur pas grand chose ; je reste persuadé que pour passer à l'action il faut d'abord avoir réussi à faire prendre conscience ; mobiliser les esprits pour agir par la suite.
Ce film constitue en ce qui me concerne l'un des films référence de 2006, à n'en pas douter.
BB94