Le monde de la chasse évolue - Sud ouest 9 sept 2006
*Vous pouvez réagir à contact@sudouest.com. Une sélection de ce courrier
sera publiée dans les éditions de samedi prochain.*
_SUD OUEST -- 9 septembre 2006-09-11_
Les temps changent. Doucement mais sûrement, le monde de la chasse
évolue vers une conception et des pratiques mieux adaptées au IIIe
millénaire. Après des années dominées par les guerres
politico-juridiques entre chasseurs et écologistes, on découvre avec
plaisir que les principales préoccupations des détenteurs de permis de
chasser ne sont plus celles longtemps entretenues par les chasseurs
de... voix.
*Nouvel esprit.* Une enquête d'opinion réalisée par l'institut CSA pour
le compte de la Fédération nationale des chasseurs est particulièrement
révélatrice à cet égard. Quand on leur demande quels sont les dossiers
prioritaires pour l'avenir de leur passion, les chasseurs répondent à
73% la sécurité - en référence, sans aucun doute, aux trop nombreux
accidents enregistrés notamment dans les battues au gros gibier - puis
l'aménagement des territoires à 63 %, devant la mise en place de quotas
pour certaines espèces, à 51%.
Sécurité, aménagement et gestion des espèces sont les trois nouvelles
priorités et preuve supplémentaire de ce nouvel esprit, le souhait de
voir mettre en place des carnets de prélèvements suit de près, avec 36%.
À un point seulement derrière le fameux sujet des dates de chasse (37 %)
qui alimenta la polémique durant de nombreuses années.
Un autre chiffre balaie également quelques caricatures : celui des
difficultés rencontrées avec d'autres usagers de la nature. Si 6 % de
chasseurs expliquent avoir eu des conflits d'usage avec des promeneurs,
ils sont aussi 4 % à avouer en avoir connu avec d'autres... détenteurs
de permis de chasser.
*Derrière le football*. On est donc loin du conflit sur le partage de
l'espace entre chasseurs et opposants, tel que certains le présentent.
Chacun a sa place et cette volonté d'apaisement n'est sans doute pas
étrangère à une relative stabilisation des effectifs. Après des années
de chute libre, l'érosion semble freinée, et le nombre des permis se
stabilise autour de 1 400 000, précisément 1 335 973 en 2004-2005, dont
près de 200 000 pour notre Région (lire par ailleurs); la saison
dernière, la baisse générale n'a été que de 0.8 %. Ce nombre de
licenciés permet à la chasse de rester le deuxième sport-loisir
national, derrière le football et devant la pèche.
Un résultat qui pèse son poids en termes économiques, puisque le budget
annuel moyen d'un chasseur s'élève à 1 590 euros, entre l'entretien d'un
ou de plusieurs chiens, l'arme, les munitions, la cotisation à une
société de chasse, ou autres achats d'équipements spéciaux.
Charles-Henri de Ponchalon, le président de la Fédération nationale des
chasseurs, estime ainsi que « la chasse génère un flux financier annuel
de près de 2,3 milliards d'euros, garantissant la pérennité de 23 000
emplois, essentiellement ruraux ».
*Activité de nature.* Ces chiffres ne peuvent suffire à dissimuler
malgré tout que les chasseurs ont dans 69% des cas plus de 45 ans,
contre 26% pour une tranche allant de 25 à 44 ans, et 5% pour les moins
de 25 ans. Même si des efforts sont faits pour séduire les femmes (2 %
des permis) et les jeunes, en particulier avec la chasse accompagnée
grâce au parrainage d'un ancien, le renouvellement de la population des
chasseurs semble délicat en raison du coût de ce loisir et de la
difficulté d'accéder aux territoires, surtout quand on est citadin, et
du manque de gibier.
On devient chasseur dans 51 % des cas par tradition familiale ou à 29 %
parce que l'on connaît un chasseur dans son entourage. 11 est évident
que l'initiation par le père ou le grand-père reste toujours la source
principale du recrutement de nouveaux chasseurs dans tous les milieux
socio-professionnels, même si les ouvriers et les agriculteurs
représentent plus de la moitié des porteurs de fusil.
Parmi les motivations des nouveaux venus, le tir ne représente que 6 %,
très loin derrière l'envie de pratiquer une activité de vraie nature
(60%). C'est dans ce créneau que la chasse moderne peut trouver sa
place, en consentant encore de gros efforts pour la gestion des
territoires et le retour d'un petit gibier naturel. Le temps de la
chasse-cueillette de nos grands-pères serait alors révolu.