Peut-être que le problème c'est la nature humaine... Extrait:
Alors que nous étions assis immobiles en silence, un Lynx apparut.
Comme le vent soufflait de la vallée, il n'avait pas senti l'odeur de
l'homme. Il ronronnait en se frottant contre la pierre, et la queue
dressée, jouissait du bonheur de la terre. Puis, il dévala la colline
et disparut dans les fourrés. Il protégeait sa tanière, sa caverne ou
sa couche. A l'affût du danger, il protégeait son bien essentiel, ses
chatons. Il craignait l'être humain plus que tout, l'homme qui croit
en Dieu et prie, l'homme riche avec son fusil qui tue si facilement.
[…]
Si vous n'êtes pas en relation avec les êtres vivants de la terre,
vous risquez de perdre votre rapport avec l'humanité, aux être humains.
[…]
Si nous pouvions établir une relation profonde et durable avec la
nature, nous ne tuerions jamais d'animaux pour nous nourrir, nous ne
ferions jamais de mal aux singes, aux chiens ou aux cochons d'Inde en
pratiquant la vivisection dans notre seul intérêt.
[…]
L'homme a massacré des millions de baleines et il en tue encore. Il y
a d'autres moyens d'obtenir tout ce pourquoi il massacre. Mais
apparemment il adore tuer le cerf fuyant, la merveilleuse gazelle et
le grand éléphant. Nous aimons aussi nous tuer les uns les autres.
Depuis le début de leur histoire sur la terre, les êtres humains n'ont
jamais cessé de s'entre-tuer. Si nous parvenions, et nous le devons, à
établir une relation immuable avec la nature, avec les arbres, les
buissons, les fleurs, l'herbe et les nuages – alors nous ne tuerions
jamais un être humain pour quelque raison que ce soit. La tuerie
organisée, c'est la guerre.
[…]
Ceci est notre terre, non la vôtre, la mienne ou la sienne. Nous
sommes là pour vivre en nous aidant les uns les autres et non en nous
détruisant. Ce n'est pas là une idée romantique, mais la réalité
présente. Pourtant, l'homme a divisé la terre, espérant trouver
individuellement le bonheur, la sécurité, un sentiment de réconfort
immuable.
[…]
Pourquoi cette division entre l'homme et l'homme, la race contre la
race, le culture opposée à une autre culture, une suite d'idéologies
dressée l'une contre l'autre ? Pourquoi ? Pourquoi il y a-t-il cette
séparation ? L'homme a divisé ce qui est à vous et ce qui est à moi,
pourquoi ? Serait-ce que nous cherchons à nous sécuriser, à nous
protéger par l'adhésion à un groupe particulier ou à une croyance, à
une foi ? Car les religions nous ont aussi divisés, elles ont dressé
l'homme contre l'homme, les hindous, les musulmans, les chrétiens les
juifs, etc. La nationalisme est son malheureux patriotisme sont en
fait un forme glorifiée et anoblie du tribalisme. Par la communauté de
langage, de superstitions, de systèmes politiques et religieux, il y
a, dans toute tribu, qu'elle soit petite ou grande, un sens
d'appartenance. Et l'on s'y sent en sécurité, protégé, heureux,
rassuré. Et pour cette sécurité, ce réconfort, l'homme est prêt à tuer
les autres qui ont le même désir de se sentir à l'abri, d'être
protégé, d'appartenir à quelque chose. Ce désir puissant
d'identification de la personne à un groupe, un drapeau, un rituel
religieux, etc., nous donne le sentiment d'avoir des racines, de ne
pas être des vagabonds sans toit.
[…]
Tant qu'il n'y aura pas un changement radical qui nous fasse effacer
toutes les nationalités, les idéologies et les divisions religieuses
pour établir une relation globale – d'abord psychologique et
intérieure, puis organisée à l'extérieure – nous continuerons à faire
la guerre. Si vous faites mal aux autres, si vous tuez, que ce soit
pas acte de colère ou par le meurtre organisé qui s'appelle la guerre,
vous, qui êtes l'humanité, et non un homme séparé se battant contre le
reste de l'humanité, vous vous détruisez vous-même.
[…]
Qu'est-ce qui vous fera vous détourner de toute division, qu'elle soit
religieuse, nationale ou éthique ? Davantage de souffrance ? Mais la
souffrance s'est perpétuée pendant plusieurs milliers d'années et
l'homme n'a pas changé ; il continue encore dans les mêmes traditions,
le même tribalisme, les mêmes divisions religieuses entre « mon dieu »
et « votre dieu ». Les dieux et leurs représentants sont des
inventions de la pensée ; ils n'ont pas de réalité dans la vie
quotidienne.
[…]
L'homme, c'est à dire vous, peut-il amener en lui un changement
[radical], et ne pas dire : « si je change, cela aura-t-il la moindre
importance ? Se pourrait-il que ce soit sans effet, comme un goutte
d'eau dans l'océan ? A quoi bon changer ? » Cela est une question
erronée, si je peux me permettre de l'indiquer. Cette question est
fausse parce que vous êtes le reste de l'humanité. Vous êtes le monde,
vous n'êtes pas un Américain, un Russe, un hindou ou un musulman. Vous
êtes hors de ces étiquettes et de ces mots, vous êtes le reste de
l'humanité parce que votre conscience, vos réactions, sont semblables
à celles des autres hommes. Vous parlez peut-être une langue
différente, vivez selon d'autres coutumes, cela est la culture
superficielle - il semble que toutes les cultures le soient – mais
votre conscience, vos réactions, votre foi, vos croyances, vos
idéologies, vos peurs et vos angoisses, votre isolement, votre peine
et votre plaisir sont semblables à ceux du reste de l'humanité. Votre
transformation affectera toute l'humanité.
Extrait de : Krishnamurti, J. 1983, « Dernier journal ». Editions du
Rocher.
Quelqu'un a posté ça, je trouve très bien ce texte que j'ai un peu survolé tout de même, alors je voulais vous le faire partager.