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 Scandale du traffic d'animaux

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AuteurMessage
Steph
Invité




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MessageSujet: Scandale du traffic d'animaux   Scandale du traffic d'animaux EmptyMer 6 Juil - 18:08

Le commerce illégal des animaux sauvages met en péril des milliers d'espèces dans le monde. Ne soyez pas complice en rapportant dans vos bagages mygales, perroquets ou félins...
Aéroport de Francfort, septembre 1999. Après un bref séjour au Mexique, une Française vivant en Allemagne rentre chez elle avec deux énormes valises. Rien à déclarer. Un signe suspect pour les douaniers qui s'empressent de fouiller les bagages. Banco ! Ils découvrent l 300 mygales vivantes. Estimation du butin : 800 000 francs.
Quelques mois plus tôt, leurs collègues de l'aéroport de Roissy-Charles-de-Caulle, à Paris, ont fait encore mieux: 455 tortues, 27 serpents dont 24 boas ont été retrouvés dissimulés sous des objets artisanaux.
Les trafiquants n'en étaient pas à leur premier coup et avaient tout prévu : chaque animal était enveloppé dans un sac en coton, le tout recouvert d'une couche de zinc isolante fermée par des joints en silicone pour passer au travers des rayons X.
Du travail d'expert. « Nous effectuons au moins une saisie par jour, affirme Jean-Yves Mahé, directeur régional des Douanes à Roissy. Parfois, c'est juste un serpent ou un singe ramené mort dans une valise pour être cuisiné. Mais il nous est aussi arrivé de saisir 576 kilos d'ivoire brut. » En 1999, les douaniers de Roissy ont saisi 9 780 articles d'origine animale et presque 500 animaux vivants !
Après la drogue et les armes, le trafic d'animaux et de végétaux sauvages est considéré comme la troisième source la plus importante de revenu illicite.
L'association écologiste internationale World Wild Fund (Fonds Mondial pour la Nature - WWF) estime le marché à 100 milliards de francs par an. Si des milliers d'espèces animales et végétales sont aujourd'hui menacés de disparaître partout dans le monde, ce n'est pas seulement à cause de la déforestation et de la pollution, mais aussi de ce commerce illégal. Des grenouilles, des serpents, des perroquets, des singes, des araignées, des insectes et même des félins... rien n'échappe au pillage de la nature.
Au total, plus de 27 000 espèces sont menacées dans le monde et protégées par la Convention de Washington (1973). Donc interdites ä la vente. Cette convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES) a mis en place une réglementation très stricte pour limiter le trafic d'animaux et de végétaux au niveau international. En s'appuyant sur la CITES, l'Union Européenne a édicté un règlement encore plus strict. Ainsi, les espèces menacées sont répertoriées en quatre catégories, dénommées annexes A, B, C et D. Les espèces les plus menacées (annexe A) sont interdites à l'importation et à l'exportation. II s'agit par exemple des gorilles, lémuriens, ou de certains perroquets très rares. Elles ne doivent par circu1er sur le territoire européen sans un permis CITES, une sorte de passeport obligatoire pour passer les frontières. Le permis CITES vérifie la provenance du spécimen mais aussi les futures conditions d'hébergement et de soin de l'animal. Les espèces dans l'annexe B peuvent être commercialisées plus facilement, mais elles doivent aussi bénéficier d'un permis. Les catégories C et D doivent bénéficier d'une autorisation d'importation, mais les formalités administratives sont moins contraignantes.

2. PANTHÈRE DANS LE LOT ET GARONNE
En France, une autre loi, l'arrêté Guyane, stipule que toutes les espèces présentes en Guyane sont interdites à la circulation et à la vente sur le territoire français. Cela pour éviter que le département d'Outre-mer devienne la plaque tournante du trafic en Amazonie. Mais, en dépit de cette réglementation, chaque année, des dizaines de milliers d'animaux passent les frontières illégalement, par les airs, les mers ou les routes. La grande majorité meurt pendant le transport. Certains sont congelés, d'autres empaillés. À l'aéroport de Roissy, une animalerie de 2 000 mètres carrés peut accueillir tous les animaux saisis vivants : du lionceau au ouistiti, en passant par les grenouilles maintenues en vie dans une ambiance tropicale artificielle.

« Un jour, dans le Lot-et-Garonne, nous avons intercepté une voiture dans laquelle se trouvait une panthère des neiges, une espèce en voie de disparition. Elle était venue du Kirghizistan par la Yougoslavie, la Turquie, l'Egypte, le Maroc et l'Espagne », raconte Ismaël-Alexandre Costa, chef de la Brigade mobile d'intervention spécialisée dans le trafic, à l'Office national de la chasse (ONC). La vente de l'animal devait permettre de financer le voyage des réfugiés.

3. UNE MAFIA PRÊTE A TOUT
Dans les pays pauvres, le commerce de la nature est une source de revenus considérable. Et certains trafiquants sont prêts à tout. Même à tuer, ainsi, en Afrique de l'Ouest, des perroquets gris font l'objet d'une traque sans merci. Au sud du Nigeria, le village d'lkodi est surnommé le paradis des perroquets parce que des milliers d'oiseaux vivent dans la forêt. Les villageois ramassent les plumes tombées du ciel et les vendent à des guérisseurs qui les utilisent dans des remèdes traditionnels. Mais ils se heurtent aux braconniers ghanéens qui capturent les oiseaux et travaillent pour le compte d'une véritable mafia locale. Tous les villageois qui ont essayé de détruire les pièges ont été assassinés. Et pour cause : les perroquets gris sont revendus entre 4 000 et 8 000 francs pièce dans les pays occidentaux.
Et pour cause : les perroquets gris sont revendus entre 4 000 et 8 000 francs pièce dans les pays occidentaux. En 15 ans, on estime à 500 000 le nombre des oiseaux exportés. Un beau pactole ! Sans compter que les perroquets gris sont loin d'être les seuls à être braconnés. Sur les 330 espèces de psittacides (perruches, perroquets...) officiellement recensées dans le monde, un tiers est en grave danger d'extinction et plus de la moitié est commercialisée régulièrement.
Certaines espèces, comme l'ara de Spiks, se vendent plus de 300 000 F pièce ! « Les aras sont plus nombreux en captivité que dans la nature, et personne ne cherche à les relâcher ni à les faire se reproduire car plus ils sont rares, plus ils sont chers », note Fabrice Bernard, garde ä I'ONC. Comble du cynisme, certains braconniers n'hésitent pas à éradiquer une espèce pour faire grimper les prix. Bref, la mort de la nature devient un business juteux.
Pour qui ? Pour des collectionneurs, des "passionnés", voire des gens en manque d'affection qui rêvent de s'offrir un animal original pour leur tenir compagnie. Dans les pays occidentaux et particulièrement en France, le marché des nouveaux animaux de compagnie (NAC) explose. Avoir un chien, un chat, un hamster, c'est dépassés ! Désormais, la mode est aux tortues, aux reptiles, aux insectes... Plus c'est bizarre, rare et dangereux, et plus ça plaît. La dernière mode: posséder des dendrobates, petites grenouilles venimeuses très colorées dont raffolent les Allemands. Les scorpions, les serpents venimeux et les araignées sont aussi très en vogue.
« Certaines personnes détiennent plus de cent mygales chez elles, les adorent et les dorlotent sans avoir conscience que leur passion met en péril ces espèces et détruit la nature », raconte Stéphane Ringuet, chargé de programme Trafic-France, un organisme dont la mission est de lutter contre le commerce illégal. Sans compter qu' Internet est une aubaine pour les trafiquants. « Nous avons recensé 99 000 sites Internet sur lesquels sont commercialisés des perroquets. Au total, plus de 220 espèces sont vendues via ce réseau, s'indigne Jerôme Pensu, conseiller technique du Conservatoire des espèces psittacines, à Kerret, dans le Morbihan. La France est d'ailleurs le premier pays importateur de perroquets en Europe... »
La situation prend parfois une tournure inquiétante car, par nature, ces animaux ne sont pas domestiques. Ainsi, il n'est pas rare que des personnes soient totalement dépassées par leurs nouveaux compagnons. Achetés tout petits, ils sont gentils, mais lorsque ces animaux arrivent à taille adulte, les choses se gâtent. « La plupart des propriétaires ne savent pas prendre soin de leurs animaux exotiques qui meurent rapidement », témoigne Didier Boussarie, vétérinaire et président du GENAC (groupe d'études sur les nouveaux animaux de compagnies). S'ils parviennent a. survivre, ils sont parfois relâchés dans la nature. Ils peuvent alors envahir le milieu et détruisent les espèces locales.
Ainsi, le vison d'Amérique a éliminé le vison d'Europe, et la tortue de Floride la cistude d'Europe. « En fait, les personnes qui achètent illégalement des animaux exotiques détruisent deux fois la nature. D'abord dans le pays où l'espèce est prélevée, ensuite dans le pays où elle est introduite », résume Stephane Ringuet.


4. VENTE ILLÉGALE EN BOUTIQUE

Les petites bêtes ne sont pas les seules à faire des adeptes. Les félins comme les lions, les pumas ou les tigres ont aussi du succès. Petits, ils ressemblent à des peluches. « Mais lorsqu'ils grandissent, les gens cherchent à s'en débarrasser. Car ils prennent trop de place et mangent trop. On ne sait plus quoi faire de ces animaux qui se reproduisent très vite en captivité. Même les parcs zoologiques les refusent », témoigne Jacques Winterguest, sous-directeur adjoint de la chasse, de la faune et de la flore, au ministère de l'Environnement.
La plupart du temps, les acheteurs ignorent qu'ils sont dans l'illégalité. Ainsi, cette femme qui explique fièrement dans une émission télévisée comment elle a réussi à passer les douanes avec un singe dans ses bagages. Mais aucune information sur le fait qu'elle est passible d'amende et même de prison. Ou encore cette annonce parue, en février 2000, dans le journal gratuit du métro parisien, "A Nous Paris", d'une boutique située sur les quais de Seine vendant un perroquet d'Amazonie, l'ara hyacinthe, pour une valeur de 110 000 francs... Problème : cette espèce menacée, très rare, n'est normalement autorisée sur le territoire européen qu'à des fins scientifiques.
Contrôlée par les Services vétérinaires, la boutique a présenté un permis CITES, assurant que l'animal était bien ne en captivité et issu d'un élevage agréé. « II y a 99 % de chance pour que cet oiseau soit issu du trafic. A ma connaissance il n'y a pas d'éleveur agréé pour cet oiseau et il est peu probable qu'il soit en captivité depuis deux générations, c'est-à-dire 20 ans, comme le veut la loi », affirme Jerôme Pensu, du Conservatoire des espèces psittacines. Un cas flagrant de fraude ? En tous les cas, aucun autre organisme n'a réalisé de contrôle. Les gardes de I'ONC n'ont pas été autorisés à vérifier 1'authenticité du permis. Et rien ne prouve qu'il ne soit pas faux car il existe aussi un véritable trafic de faux permis CITES !
Pour Jerôme Pensu, « le doute est d'autant plus fort que cette animalerie commercialise couramment de nombreuses espèces protégées comme le cacatoes des Mollufues ou l'ara militaire, deux espèces recensées dans l'arrêté Guyane et totalement interdites à la vente. »

5. LAXISME DES AUTORITÉS

Pourquoi les réglementations qui visent à protéger les espèces menacées sont-elles si fadement bafouées ? Le premier problème vient de l'identification de l'animal. Comment savoir s'il est ou non protégé ? Quelque 27 000 espèces sont concernées et les douaniers ou les gardes peuvent en perdre leur latin. « On dispose de très peu de documents photographiques ou même écrits pour apprendre à identifier les espèces menacées. Nous sommes quelquefois obligés d'investir dans des livres pour mettre une image sur un nom et faire notre travail », témoigne un garde de I'ONC.
Une fois identifiée, si l'espèce est protégée, elle doit bénéficier d'un permis délivré par la CITES pour être vendue. Ce permis garantît que l'animal est né en captivité, c'est-à-dire dans un élevage, et n'a pas été prélevé dans la nature. Les oiseaux doivent aussi être bagués car il est souvent difficile de distinguer deux animaux de la même espèce.
Mais malheureusement, là aussi, il y a des trafics. « On voit de tout, des faux permis, des fausses bagues, sans oublier le trafic d'oeufs », dit Didier Boussarie, vétérinaire, qui plaide pour la mise en place d'une puce électronique posée sur les animaux afin de mettre un terme aux fraudes. « La législation actuelle ne sert a rien car il y a une tolérance beaucoup trop forte de l'administration. N'importe qui peut acheter un iguane ou un perroquet protégé, même dans des magasins, sans être menacé de poursuites », insiste le vétérinaire.

6. DES SANCTIONS RIDICULES

Quant aux braconniers, s'ils sont interceptés, ils risquent au plus six mois de prison et 60 000 Francs d'amende... une goutte d'eau par rapport à la vente de leur marchandise. Pas de quoi les dissuader. « Tous les gros trafiquants interceptés récidivent tôt ou tard », confirme Ismael-Alexandre Costa. D'autant que rien ne les empêche d'écouler leur marchandise. Car lorsque les animaux sont capturés vivants, ils sont confisqués un certain temps... puis finalement restitués à leurs propriétaires. Un véritable scandale passe sous silence. « Les zoos et les structures d'accueil sont pleins ä craquer. Nous manquons cruellement de lieux pour placer les animaux. Nous sommes donc obligés de les redonner en dépôt à ceux à qui nous les avons confisqués et nous avons l'impression de ralentir un peu le trafic mais sûrement pas de le résorber », affirme un garde qui préfère garder l'anonymat.
Bref, les contrôles effectués à l'heure actuelle sont quasiment inutiles. Plusieurs solutions existent pourtant, à commencer par la création de structures d'accueil et d'une autorisation à la vente limitée aux espèces nées en France en captivité. II est par exemple absurde de continuer d'importer certaines espèces alors que l'Europe en possède des stocks considérables en captivité et dont personne ne veut ! La loi (qui date de 1976) mériterait aussi d'être revue pour dissuader les trafiquants de récidiver en infligeant des amendes et des peines de prison plus fortes. Mais il existe une solution encore plus efficace et facile à mettre en oeuvre. A chacun de nous de refuser de participer au commerce en achetant des animaux sauvages... même si ceux-ci nous font craquer.


Un article paru dans Santé Magazine
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